La guilde d’Amnésia est réputée pour sa discrétion légendaire, ce qui lui permettait d’éviter le moindre problème avec le conseil de la Magie. Même les habitants de la région dissimulaient la guilde aux yeux des étrangers qui ne sont pas dignes de confiance. Mais pour une fois, quiconque entrerait dans la guilde ne remarquerait qu’un endroit de fête.

En effet, il y avait une fête !

La fête s’était déclenchée vers 18 heures. On n’aurait pas vraiment dit une fête au début. Il y avait juste une des équipes les plus puissantes qui venait de finir une mission. Ils s’étaient mis à boire en parlant haut et fort. Puis ils ont commencés à inviter tous le monde à partager le bonheur d’avoir réussi une mission, et de fil en aiguille, toute la guilde était en train de boire et de manger sans trop savoir pourquoi. Comme si rien n’avait d’importance pour le moment. Pour Dageki, cette fête était la première de son existence. Il n’avait pas l’habitude d’entendre autant de bruits, dans sa forêt. Il s’était d’abord mis à l’écart, les oreilles légèrement douloureuses. Puis on lui avait donné une tape sur l’épaule ainsi qu’une choppe pour trinquer avec tous le monde. Hésitant au début, il accepta quand il vit qu’un homme le fixait des yeux. Pas n’importe quel homme, le Maître de la guilde en personne, Hiroji Keigo.

Dageki ne l’avait pas encore aperçu auparavant, mais il savait qu’il était le maître car il était en bout de table. Les autres membres, s’ils rigolaient bien entre eux en se moquant mutuellement, ne parlait du mal de cet homme d’aucunes manières. Le respect qu’ils lui vouaient était sans bornes. C’est pour cela que Dageki empoigna sa choppe et la vida d’un trait, sous les acclamations d’une demi-douzaine de membres. La boisson avait un léger gout de pommes rehaussé de miel. Il demanda ce que c’était, on lui répondit qu’il s’agissait d’hydromel, une boisson alcoolisée à base de miel. Dageki en redemanda une autre, puis encore et encore une, trouvant la boisson excellente. Il ne se sentait pas ivre, contrairement à certains membres qui commençaient à rire de plus en plus fort et à glisser par terre sans raison. En clair, tout était magnifique.

Mais il faut toujours une étincelle pour mettre le feu aux poudres.

Cette étincelle avait un nom : Gand. Gand était connu dans la guilde pour posséder une force phénoménale. Cette force se voyait surtout sur ses bras, musclés et puissants. Et il savait s’en servir. On entendit un coup étouffé, et l’on vit un membre tombé à terre en se frottant la tête. D’après les éclats de voix qu’il entendait, Dageki comprit qu’une histoire de « Binouze qu’est à moi que tu m’as piqué » était à l’origine du coup. Seulement voilà, le calme qui précédait le coup-si l’on pouvait qualifier la fête de calme- n’était pas près de revenir. Gand et la personne qui avait reçu son coup de poing avaient décidés de régler le problème de la meilleur façon qu’il soit : Avec des mandales dans la face et des coups de pieds dans les fesses. Tous le monde rigolait, et Dageki faisait pareil. Il n’imaginait pas que taper des gens que l’on appréciait était quelque chose de courant. Il reprit une énième choppe quand on entendit un toussotement, très léger mais pourtant audible par-dessus tout le vacarme. Tous se turent et se retournèrent pour entendre ce que le Maître voulait dire. Il regarda tous le monde avec un regard inexpressif puis il eut un léger sourire, presque invisible :

« Je vois que vous avez décidés de tourner la fête à la bagarre ! Puisque c’est comme ça, dit-il pendant que les membres de la guilde ne bougeaient plus, j’offrirais une petite récompense à celui qui réussira à maintenir Gand plus de 10 minutes au sol ! »

Les membres encore debout sautèrent de joie. La soirée allait s’annoncer mouvementée ! et pendant près d’une heure, tous essayèrent de mettre Gand à terre. Certains tenaient 1 minute, d’autres 1 secondes. Gand quand à lui, semblai tenir la victoire pour acquise. Un sourire se dessinait sur ses lèvres quand la file d’attente qui s’était formée pour relever le défi diminuait au fur et à mesure que la soirée s’avançait. Encore quelques membres à battre et il gagnait. Dageki lui, ne voulait pas vraiment participer à ce concours. Mettre un adversaire au sol n’était pas sa tasse de thé, il préférait les combats purs et durs. Il restait dans son coin, attaquant une choppe d’hydromel-sa 20ème si son compte était juste-quand il se sentit épié à nouveau. Et comme avant, le Maître de la guilde le regardait, l’examinait, le jugeait. On l’aurait dit en train d’évaluer le garçon. Il finit par avoir un rapide coup d’œil vers Gand qui envoya promener son adversaire pour finalement se reporté vers Dageki en lui adressant un hochement de tête en direction des combats. Apparemment, il demandait au garçon de se battre, même s’il n’avait pas envie.

Dageki soupira, acheva sa choppe et avança dans le coin de la taverne tout en évitant les personnes endormis ou assommées sur le sol pour rejoindre le combat. Gand venait de faire abandonner son adversaire en se mettant sur son dos. Il riait de plus en plus fort, comme si il allait exploser sous l’effet de l’adrénaline. Le garçon entra dans le cercle délimité par les spectateurs, salua Gand et se mit en position de combat. Tous se mirent à rire en le voyant. En effet, comment un gamin pouvait espérer tenir face à un homme aussi fort. Dageki observa son adversaire, élaborant une tactique pour le faire tomber. Il n’eut pas beaucoup de temps pour réfléchir, car Gand lui fonça dessus pour l’étreindre avec ses bras. Dageki se glissa sous son bras gauche et passa derrière lui. Gand se retourna et réitéra la manœuvre, qui échoua encore deux autre fois. Le garçon commença alors à frapper son ventre sans utiliser toute sa force, juste pour l’énerver. Il avait besoin de ça pour accomplir son plan. Gand commençait à s’énerver et semblait sur le temps de frapper pour de bon. Et ce fut ce qu’il fit. Il donne un coup de poing rapide et puissant, un des coups qui lui valait son titre de surhomme dans la guilde. Seulement voilà, Dageki avait anticipé son coup et s’était déjà téléporter. Plus personne ne savait où il était, avant d’entre un « YAAAAAAAA » venant du plafond. Il lâcha les poutres avec lesquelles il se tenait et tomba comme une pierre sur Gand, les jambes en avant. Le choc fut rude et envoya les hommes au tapis. Sans attendre qu’il ne se relève, Dageki se mit sur le dos de son adversaire en collant le sien. Il prit les bras de Gand avec les siens et immobilisa ses jambes de la même façon. Vu de coté, on aurait dit que Dageki était une sorte d’araignée qui restait collée sur le dos de Gand. Il dut utiliser toute sa force pour le maintenir immobile, car son adversaire ruait comme un bœuf pour se détacher de son étreinte.

Les minutes s’écoulèrent lentement, le silence s’étant instauré au niveau de la taverne, seulement troublé par la respiration saccadé et légère de Dageki, ainsi que celle de Gand, profonde et rapide. Le garçon savait qu’il avait gagné car la prise qu’il utilisait avait pour effet d’empêcher les muscles de son adversaire d’être utilisé entièrement. L’inconvénient, c’est qu’il devait utiliser toutes ses forces dans cette prise, ce qui rendait la tâche difficile. Mais au bout de 10 minutes, le Maître frappa dans ses mains et tout le monde se mit à refaire un boucan de tous les diables. Dageki libéra Gand, mais il se laissa choir sur le sol, à bout de force comme s’il s’était entrainé toute une journée. Des membres de la guilde l’aidèrent et le firent s’assoir à une table pour l’aider à se reposer pendant que Gand grommelait dans son coin.

Du coin de l’œil, Dageki vit le Maître qui l’observait, un léger sourire aux lèvres. Peut-être que maintenant, on le prendrait plus au sérieux, dans la guilde !